Pour les Marianne de ce monde

arbre coeur

C’est sous un beau soleil que j’ai eu le goût d’écrire sur un sujet plus sombre. Sur un moment de ma vie qui est resté tabou, comme s’il n’avait jamais existé. C’est d’ailleurs pour ça qu’il faut en parler. Pour ça et pour les Marianne de ce monde…

Je ne la connaissais pas, la belle Marianne qui s’est suicidée le 24 avril 2016, mais ça aurait pu être moi, il y a 20 ans. J’avais 12 ans et le monde à mes pieds. Souriante, première de classe, beaucoup d’amis, personne n’aurait pensé que j’avais en moi une grande souffrance. Je me souviens très bien de ce sentiment. De cette pensée qu’il faudrait que je disparaisse. Que ce monde n’avait pas de place pour moi.

Petit à petit, cette pensée a pris de l’ampleur. J’ai réfléchit au scénario, j’ai écrit des lettres. Je pense qu’au fond, je n’ai jamais eu la réelle intention de partir. Mais j’ai quand même plongé profondément dans la noirceur, tout en restant rayonnante de l’extérieur.

Je me sens bien matante de le dire, mais dans mon temps, les réseaux sociaux n’existaient pas. D’une certaine façon, ça m’a sauvée. Parce qu’au lieu de me confier à des étrangers, j’ai écrit une lettre à mes amies. Elles ont eu la présence d’esprit d’appeler Tel-Jeunes. L’organisme leur a donné certains conseils, comme celui de ne pas me laisser seule. Mes amies, avec qui je n’ai plus aucun contact aujourd’hui, appelaient chez moi sans arrêt. Ça a mis la puce à l’oreille de mes parents…

On avait de la visite cette journée-là. Abruptement, la visite est partie. Je ne comprenais pas trop ce qu’il se passait. J’ai eu ma réponse en entrant. Mes parents pleuraient. Nous avions beaucoup de conflits, mon père et moi…

Je n’ai pas envie d’expliquer en détails les raisons pour lesquelles j’ai pensé au suicide. D’abord parce que ça m’appartient. Ensuite, parce que, des raisons, il y en a des milliers, au fond. Un mal-être, un mal de vivre, une situation familiale complexe, de l’intimidation… Ce n’est pas du pourquoi qu’il faut parler. C’est du fait que c’est passager.

Je réalise que ceux qui connaissent la Véro d’aujourd’hui ne m’imaginent probablement pas comme une personne ayant déjà voulu se suicider. C’est aussi pour ça que j’ai décidé d’en faire un article. Pour prouver que c’est passager. Qu’il y a un après. Et un beau à part de ça! Que c’est possible de rester en vie ET d’arrêter de souffrir. J’ai 32 ans, trois beaux enfants, un mari extraordinaire, une vie que j’aime et je suis heureuse. Je remercie tellement ces anciennes amies qui ont fait ce qu’il fallait, même si nos chemins se sont séparés par la suite. Je remercie tellement la vie d’avoir posé en moi la force de remonter à la surface et de m’épanouir pleinement.

Je ne peux m’empêcher de penser que la petite Marianne aussi, aurait pu être comme moi, plus tard. Nous n’avons pas su la sauver, elle, et tellement d’autres. J’ai pleuré en voyant sa photo… d’une tristesse vive et connue.

Je ne critique pas ses proches. Je m’inquiète pour la génération qui suit par contre… Il faut sortir de nos écrans, ça presse! Il faut parler. Il faut écouter. Il faut observer. Il faut lâcher le virtuel un peu et se connecter les uns avec les autres, pour de vrai. Ça a sauvé Véro il y a 20 ans et ça peut sauver les Marianne de ce monde.

 

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