J’ai fait ça comme une grande. Je suis allée le porter avec assurance, je lui ai donné au moins 5 bisous, je lui ai dit que je l’aimais beaucoup et je suis partie, souriante. Il était prêt, je pense, parce qu’il m’a regardée de ses petits yeux espiègles, un morceau de raisin à la main.
Je pensais moi aussi que j’étais prête. J’avais hâte de recommencer le travail. Hâte d’avoir un peu plus de temps avec moi-même, hâte de faire autre chose que des sons, des mimiques et du “torchage”. Je pensais que j’avais pris de l’expérience depuis le premier, de la maturité, de la confiance aussi. Je me croyais moins émotive. Je pensais m’en tirer avec un petit pincement au cœur et un sourire à demi-jaune.
Pourtant, il y a dix minutes à peine, j’avais le front accoté sur le volant de mon petit camion, au chaud dans le garage, et je vidais tout ce que mes yeux étaient capables de produire. Des larmes plein les joues sous des lunettes soleil qui ne cachait plus grand-chose. La bouche grande ouverte, laissant échapper de gros sanglots. De façon dramatique et exagérée, j’ai pleuré le grand vide que ce petit être laisse en quittant le nid une journée… J’avais l’impression de me vider les entrailles tellement ça faisait mal. Je ne m’attendais pas à ça.
J’ai l’esprit de lionne. Mes petits sont jamais bien loin. Je leur apprends à se débrouiller pour pas crever de faim, un jour à la fois. Je leur montre tout ce que je sais, tout ce que je crois être le mieux en tout cas. Je les rassure, coups de langue transformés en bisous, caresses et berceuses. J’ai l’esprit de lionne ancré jusqu’aux os. Je dois les protéger, quitte à en perdre des morceaux. C’est plus fort que la raison, plus solide que le roc. Ils sont ma chaire et mon sang. Il n’y a rien de plus animal, de plus primaire que ce lien qui nous unit. C’est moi leur mère.
Telle une lionne, je me suis moi-même ramassée par le cou dans le camion. Je me suis redressée, déterminée à apprendre une leçon de ça aussi. C’est pourtant avec le cœur encore chamboulé que j’écris. Parce qu’au fond, je sais. Je sais qu’il n’y pas de leçon à comprendre de ce sentiment. C’est de l’amour, pur, grandiose et beau. Un amour qui m’habitera toujours. Un amour qui donne beaucoup et qui reçoit en triple quadruple. Un amour qui fait peur parce qu’il nous rend vulnérable et dépendant. Un amour qui se construit, qui évolue, qui apprend.
Au fond de moi, je sais qu’il va bien. Je sais que, comme son grand frère, il prendra sa place et grandira avec assurance. Il a bien appris! Il a son caractère et se fait comprendre. Il est charmeur comme dix et nous fait fondre avec un seul regard, un seul sourire. Il pourra faire ce qu’il veut dans la vie lui aussi, personne ne l’en empêchera. Mais la lionne guette quand même, prête à bondir. 😉
Crédit photo via Pinterest
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